En août 2021, Maxime Bernier, chef du Parti populaire du Canada (PPC), était de passage dans la province. À cette occasion, des citoyen(ne)s se sont rassemblés afin d’accueillir leur chef, révélant ainsi la popularité relative du mouvement au Nouveau-Brunswick.
À la dernière élection, le parti associé à la droite populiste a plus que doublé ses résultats. Le PPC a récolté 5% des voix à l’échelle nationale et plus de 7% au Nouveau-Brunswick, selon les chiffres de Radio-Canada.
Circonscriptions | Taux |
Acadie-Bathurst | 5,9% |
Madawaska-Restigouche | 6,2% |
Tobique-Mactaquac | 8,5% |
Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest | 8,4% |
Fundy Royal | 7,8% |
Beauséjour | 7,6% |
Moncton-Riverview-Dieppe | 6,3% |
Saint-Jean-Rothesay | 5,3% |
Fredericton | NA |
Total | 7% |
Qu’est-ce que le populisme ?
Il faut rappeler que le populisme n’est pas un phénomène limité à la droite politique. Il est présent dans la plupart des mouvements.
Le populisme est caractérisé par l’appel au peuple. Les tenants de cette tendance politique se portent à la défense de ce qu’ils considèrent être les intérêts du plus grand nombre.
S’installe alors une rhétorique qui a tendance à mettre en opposition le peuple et l’élite. Le peuple, du fait de sa souveraineté démocratique, a l’unique légitimité d’imposer sa vision politique.
De cette façon, il est perçu à la fois de façon positive et négative. Positive au sens que la démocratie doit répondre à la volonté des citoyens. Maxime Bernier a déjà affirmé qu’il ne rejette pas l’étiquette de populisme.
C’est aussi pour les mêmes raisons susmentionnées que plusieurs critiquent le populisme. La vision rigide de la souveraineté du peuple mène souvent vers la suppression de contre-pouvoirs.
De plus, il y aurait aussi un risque de marginalisation des citoyens minorisés. Les demandes de ces derniers sont souvent perçues comme contraires à la volonté populaire.
La faute des mesures sanitaires ?
Il est bien connu que les partis en marge du paysage politique attirent surtout les citoyens déçus et critiques du système.
Ils ne sont pas cyniques pour autant. Leur engagement démontre qu’ils croient encore que le système peut être réformé à l’intérieur du système démocratique existant.
Concernant le PPC, l’accroissement du support qu’il récolte est principalement lié à l’insatisfaction d’une frange de la population aux mesures sanitaires en lien avec la pandémie de la COVID.
Ce point est aussi souligné par le professeur Frédéric Boily. Maxime Bernier a joué, durant toute la campagne, la carte du discours sanitaire et les valeurs de la liberté.
Le rôle de l’écologie numérique dans le phénomène ?
L’internet a aussi un rôle à jouer dans la diffusion des idées populistes. Le partage de memes politiques, des commentaires hostiles, voire, de la désinformation, en faveur d’une position antisystème, est très présent dans l’écologie numérique.
Les stéréotypes et autres biais politiques y sont renforcés. D’autres s’inspirent de sites web douteux et partagent de l’information erronée sur les vaccins.
Certains électeur(ice)s finissent par être inconditionnellement convaincus, sur la base d’informations incomplètes, déformées, ou dont les résultats sont amplifiés. Ce qui contribue à des positions politiques plus radicales.
Est-ce que le PPC est là pour de bon ?
Le Nouveau-Brunswick a déjà connu aux élections provinciales la résurgence de partis populistes. On se rappelle du Confederation of Regions (CoR) et tout récemment du People’s Alliance.
Comme l’affirmait Katryne Villeneuve-Siconnelly au Devoir, plusieurs de ces partis sont disparus dans un temps relativement rapide (voir le Reform Party et le CoR).
La pérennité d’un parti populiste est largement liée à son succès électoral. Jusqu’à présent le PPC n’a pas encore réussi à faire élire un député, contrairement au People’s Alliance au provincial.
Déplacer la fenêtre d’Overton
Tous les partis politiques visent à convaincre les citoyen(ne)s. Les partis qui se situent à la marge cherchent à imposer leurs thèmes dans l’espace public.
Ainsi, ils cherchent à déplacer ce qu’on appelle la fenêtre d’Overton, c’est-à-dire le discours, les opinions ou les pratiques, considérées comme acceptables dans l’opinion publique d’une société donnée.
Le problème est que les partis en marge de l’échiquier politique ne récoltent pas toujours le fruit de leurs efforts. Les partis traditionnels s’adaptent rapidement et savent en profiter.
Nous l’avons vu lorsque le Parti Conservateur du Nouveau-Brunswick à réussi à s’adjoindre une partie des électeurs du People’s Alliance.
Le PPC a donc encore plusieurs défis devant lui…
Pour l’instant, il est difficile de dire si ces partis de droite vont croître dans les prochaines années.
Chose certaine, c’est que le contexte politique de crise et d’insécurité (chômage, crise économique, crise sanitaire, inflation (logement et nourriture), etc.) sert de carburant pour ce type de rassemblement politique.
Gilbert McLaughlin est chercheur postdoctoral au Centre of Hate, Bias and Extremism de l’Ontario Tech University.