Je m’en souviens comme si c’était hier. C’était en décembre 2018. J’étais président de la Fédération des étudiantes et des étudiantes de la communauté universitaire de Moncton (FÉÉCUM). Nous étions plus de 300 personnes à s’être déplacées dans le froid afin de démonter la solidarité de l’Acadie du Nouveau-Brunswick envers nos ami(e)s franco-ontariennes et franco-ontariens, après ce qu’on a appelé le « Jeudi noir ».
En effet, le gouvernement de l’Ontario, dirigé par le conservateur Doug Ford, venait d’annoncer l’abolition du Commissariat aux services en français et l’annulation du projet de création d’une université de langue française à Toronto. Le choc était terrible, et toute la communauté franco-ontarienne, atterrée.
En descendant dans les rues à Moncton jusqu’au centre culturel Aberdeen où des discours ont été prononcés, nous voulions démontrer que, malgré nos frontières provinciales, malgré la distance, nous étions solidaires car nous nous battions pour la même cause : le respect de notre langue française et la reconnaissance de nos droits.
Or, trois ans plus tard, nous avons vu le même gouvernement de Doug Ford participer à l’ouverture officielle de l’Université de l’Ontario français (UOF) à Toronto et présenter une des plus importantes modernisations de la Loi sur les services en français (LSF) que l’Ontario a connue depuis longtemps. Quel revirement!
Pour atteindre ces résultats stupéfiants en trente-six mois, il faut souligner le travail incroyable de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) présidée par Carol Jolin, ainsi que celui de la ministre des Transports et des Affaires francophones, Caroline Mulroney. La mobilisation citoyenne, la pression politique, l’intervention du fédéral et le courage des francophones de l’Ontario ont permis à un premier ministre de changer. En trois ans!
Pendant ce temps au Nouveau-Brunswick, dans la seule province officiellement bilingue au pays, nous sommes en plein processus de la révision de la Loi sur les langues officielles. Le mercredi 15 décembre 2021, les deux commissaires nommés par le premier ministre Blaine Higgs ont publier leur rapport. Dans un contexte pour le moins difficile (en pleine pandémie et avec un premier ministre peu intéressé à agir comme ministre de la LLO malgré que celle-ci l’oblige à l’être), la communauté francophone s’attend à ce que cette loi quasi-constitutionnelle et fondamentale à la cohésion sociale de notre province, soit non seulement renforcée, mais enfin respectée comme il se doit par son ministre responsable.
À moins de deux semaines du temps des Fêtes, j’espère encore un miracle de Noël : que notre premier ministre respecte le tiers de la population de la province, que nous appelons fièrement l’Acadie du Nouveau-Brunswick et qui est l’ensemble des francophones et francophiles, de toute origine. Si Blaine Higgs a besoin d’un exemple inspirant au pays, il peut regarder du côté de son homologue conservateur ontarien, Doug Ford. Qui sait, peut-être que les esprits de Noël du conte de Charles Dickens viendront le visiter et lui ouvriront les yeux sur les grandes choses que nous pourrons accomplir en tant que province si nous atteignons enfin l’égalité réelle.
Alexandre Cédric Doucet, président de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick.