“La pauvreté n’est pas plus naturelle que l’esclavage et l’apartheid. Elle est créée par les êtres humains et elle peut être éradiquée par les actions d’êtres humains.” -Nelson Mandela
Le Front commun pour la justice sociale a été enfanté par deux activistes, l’un provenant du milieu communautaire, l’autre du milieu syndical, tous deux impliqués dans les luttes des années 1990 contre les coupures à l’Assurance-chômage.
Il a connu de longs mois de gestation. Pendant cette période il fut bercé par les nombreuses discussions lors des sessions de stratégie, par les témoignages poignants et les coups de gueule des chômeuses et chômeurs lors de réunions publiques et par le son des milliers de souliers et de bottes, parfois sur le pavé et souvent dans la neige par un froid sibérien, au cours des multiples marches de solidarité partout dans la province.
Le 11 mars 1997, le nouveau-né est enfin arrivé sur la scène sociale et politique à Fredericton entouré de soixante-quinze matantes et monocles arborant de radieux sourires. Quatre présents, accompagnés de tâches à accomplir, sont déposés sur sa couchette : réformer l’aide sociale, augmenter le salaire minimum à un salaire décent, améliorer la rémunération en cas de chômage, et enfin, atteindre l’équité salariale.
Lorsque le bambin ouvrit les yeux et que ses poumons lâchèrent leur premier cri, personne ne doutait alors que ce nouveau-né pourrait accomplir de grandes choses. Son éducation fut prise en charge par l’ensemble du groupe. Elle fut basée sur trois méthodes pédagogiques: la discussion, les connaissances et l’action directe.
La première a été les discussions en ateliers sur des thèmes tels que les inégalités sociales, les femmes, la pauvreté et les mythes sur la pauvreté, etc. Des sujets discutés en long et en large lors de réunions annuelles organisées par les matantes et les monocles.
La deuxième fut l’approfondissement de sujets particuliers, comme une province sans pauvreté, la faim, l’économie pour toutes et tous, la justice avant la charité, et les droits de la personne. Autant de thèmes pour les Sommets tenus tous les deux ans.
Enfin, la dernière méthode, dont raffolait notre jeune, consistait plutôt à entreprendre des actions directes. Rien ne lui faisait autant plaisir que d’écrire des lettres à différents ministères ou des lettres d’opinions à différents journaux. Les rencontres avec les ministres provinciaux lui permettaient d’appliquer les connaissances acquises et développer ses arguments, afin de mieux défendre les travailleuses et les travailleurs, ainsi que les personnes à bas revenu. Cependant, accompagner les autres membres de sa famille lors de marches et de manifestations, y brandir une pancarte faite de ses propres mains, c’était son activité préférée.
Notre jeune adulte vient d’avoir 25 ans et parmi ses revendications on peut citer: un salaire décent pour les bas salariés, un programme d’assurance-emploi adapté au marché du travail moderne, un revenu viable pour les personnes bénéficiaires de l’aide sociale, l’équité salariale et, dans les dernières années, la protection des services publics.
Chaque année, le 17 octobre, Journée mondiale pour l’élimination de la pauvreté, c’est le temps d’aller se recueillir au monument installé par les militant.e.s du chapitre de Moncton du Front commun, situé sur les berges de la Petitcodiac.
Le texte inspirant de Joseph Wresinski inscrit sur la plaque : « Là où des hommes et des femmes sont condamnés à vivre dans la misère, les droits de l’homme sont violés. S’unir pour les faire respecter est un devoir sacré. », confirme chaque fois que son combat est un combat juste.
Jean-Claude Basque a été coordonnateur du Front commun pour la justice sociale de 2006 à 2020.