Une des plus grandes personnalités acadiennes a donné une conférence le 27 mars à Fredericton.
Herménégilde Chiasson a fait un discours public au Centre de ressources en français à l’Université du Nouveau-Brunswick dans le cadre de la célébration des cinquante ans de la publication de Mourir à Scoudouc, un des livres les plus reconnus de cet auteur.
Chiasson a été présenté par Chantal Richard, la directrice du département d’études françaises de cette université, elle-même spécialiste de l’identité acadienne et autrice, entre autres de plusieurs livres sur les conventions acadiennes et du livre Les Poèmes acadiens de Napoléon Landry (2014).

La préparation de cette conférence a permis à Chiasson de revenir sur sa trajectoire artistique, autant comme auteur que comme artiste plastique, metteur en scène et dramaturge.
D’après Chiasson : « tout ce que j’ai écrit provient des arts visuels » car il était « attiré et fasciné » par cet art, grâce auquel « on pouvait aller ailleurs. » Le début de la découverte de l’art moderne par Chiasson a été lors d’une présentation de Claude Roussel au Collège Saint Joseph de Memramcook. Chiasson a dit continuer à créer des œuvres dans le présent.
Chiasson est aussi revenu sur ses début modestes, issu d’une famille presque analphabète de Saint Simon dans la péninsule acadienne où il n’y avait pas de livres dans la maison. Il a partagé une anecdote selon laquelle sa mère lui aurait conféré un statut de quasi-dieu avec la publication de son premier livre.
Celui qui a été, de 2003 à 2009, le Lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick, a profité pour faire le point sur l’histoire de la « renaissance » acadienne à partir des années 1960, quand il a commencé ses études. Chiasson a dit que les intellectuels formés à l’Université de Moncton ont mis « au monde cette Acadie Moderne, » ce lieu où Chiasson a « décidé consciemment de rester » malgré la tendance générale des auteurs de le quitter.
Pour Chiasson, dans sa jeunesse, cette modernité était importante. À l’époque, l’identité acadienne était trop vieillotte : l’histoire éternelle d’Évangeline, Napoléon Landry et son hommage à Longfellow, etc… Il fallait, selon lui, « rejoindre les autres, là où il y a du progrès et de l’avancement. »
D’après Raoul Boudreau, les trois livres qui ont transformé la littérature contemporaine en Acadie et l’identité acadienne sont Mourir à Scoudouc, Acadie Rock de Guy Arseneault de 1973 et Cri de Terre de Raymond Guy LeBlanc de 1972.
Comme les deux autres œuvres, Mourir à Scoudouc a été publié par les Éditions d’Acadie en 1974. Cette première maison d’édition acadienne venait d’être créé par un groupe de personnes de l’Université de Moncton et ces trois livres furent les premiers à sortir.
Chiasson a dit se souvenir de la sortie de Mourir à Scoudouc, alors qu’il était à Paris et des commentaires critiques favorables. Il a admis que ça lui « a donné le vertige » de se faire connaitre publiquement de cette façon, malgré le fait qu’il avait eu des retours positifs quand ses poèmes étaient publiés. Chiasson avait divulgué ses premiers poèmes en aout 1969 dans la revue québécoise Liberté.
Malgré son importance dans la littérature francophone au Canada et pour la création d’une identité acadienne dans la modernité, Mourir à Scoudouc a été traduit en anglais seulement en 2018, par Jo-Anne Elder aux Éditions Goose Lane de Fredericton.
À une question du public sur l’état de la littérature acadienne dans l’actualité, Chiasson a dit « on est pris beaucoup dans la langue, » pour lui c’est le « comment dire » plutôt que le « quoi dire ».
L’auteur a aussi fait état des nombreux projets qu’il doit encore publier. Il est l’auteur de nombreux projets artistiques créés pendant l’époque de la pandémie du covid-19, comme des poèmes haikus qu’il a publiés d’abord sur le réseau social Twitter.
La conférence a eu lieu dans les nouveaux locaux du Centre de ressources en français à l’Université du Nouveau-Brunswick où on peut retrouver plusieurs œuvres de Chiasson sur les murs. Cette salle a été inaugurée le 24 octobre, 2024, en présence de l’historien acadien Maurice Basque. Cet évènement a fait salle comble avec les élèves des cours de français de l’Université du Nouveau-Brunswick.
Sophie M. Lavoie est membre du comité éditorial de la Coop Média NB.