La pauvreté au Nouveau-Brunswick n’a qu’à bien se tenir, car elle est sous haute surveillance! Dans le passé c’était le ministre du Développement social, un ministre élu, qui était le responsable de la lutte à la pauvreté. Plus maintenant! Il semblerait qu’on a trouvé mieux. Shawn Graham, soutenu par le parti conservateur de l’époque, a décidé de changer la structure pour une approche innovatrice. Avec nos deniers publics, on a créé de toutes pièces une nouvelle société, soit la Société d’inclusion économique et sociale. Cependant, en 2009 et 2010, on a annulé les maigres augmentations des taux de bien-être social de 2 %. Est-ce qu’on a pris cet argent qui aurait dû aller aux assistés sociaux pour financer le budget de cette nouvelle société?
Pour mieux « s’équiper » à lutter contre la pauvreté, la société de la couronne s’est dotée d’un secrétariat permanent avec un directeur général dont le salaire pouvait aller jusqu’à 103 000 $ (plus certains avantages sociaux), un agent de communication, une coordonnatrice provinciale, des agents régionaux, des secrétaires, etc. C’est comme si les dépenses importent peu lorsqu’on veut venir à bout du monstre qu’est la pauvreté!
Comme la pauvreté s’est faufilée dans toutes les régions de la province, il fallait se doter d’organismes régionaux pour surveiller sa propagation et pouvoir intervenir à temps et de façon ciblée. La solution: réunir quatre partenaires – secteur communautaire, entreprises, gouvernement et citoyens – et leur donner de la formation (250 000 $), leur octroyer un budget de fonctionnement (750 000$) et le tour est joué!On part en guerre contre la pauvreté bien équipé.
La pauvreté sera-t-elle réglée en cinq ans? Non, au contraire! On assiste présentement à une décision voulant qu’au lieu que le gouvernement prenne lui-même en main l’importante tâche de réduire la pauvreté, il la transfère aux mains d’une société de lacouronne. La livraison des services de cette société de la couronne va désormais se faire par les réseaux d’intégration communautaire.
La prise de décisions et la responsabilité sociale seront encore plus éloignées des élus à l’Assemblée législative. Les réseaux communautaires d’intégration vont devenir la voie par laquelle nous accédons aux services tels que l’intégration au travail, le mentorat-littéracie, le transport en commun, le développement économique communautaire, les entreprises sociales et l’établissement des priorités en matière d’habitation.
L’allocation des services publics à ces nouveaux réseaux a des répercussions énormeset elle soulève des questions importantes. Nous savons que les régions rurales n’ont pas les mêmes services communautaires que les villes de Saint-Jean, Fredericton et Moncton. Comment va-t-on combler le déséquilibre dans le nombre et la qualité des services offerts par les réseaux communautaires dans les régions rurales, à comparer aux centres urbains?
Nous avons tous connu des difficultés à obtenir un service dans sa langue lorsque des services ne sont pas gouvernementaux. Si les services aux gens en situation de pauvreté sont remis au secteur communautaire, comment va-ton pouvoir se faire servir dans sa langue lorsqu’on sait que présentement, ce secteur ne peut le faire? Il n’est pas certain que la nouvelle Société d’inclusion économique et sociale sera assujettie à la Loi sur les langues officielles.
Nous savons tous qu’il se fait de la petite politique au niveau local et régional. Les réseaux communautaires d’intégration devront soumettre des budgets pour recevoir des fonds de fonctionnement et pour des projets. Imaginez le lobbying politique pour avoir cet argent! Imaginez les chicanes d’argent entre les douze réseaux communautaires d’intégration! Nous savons que présentement, le secteur communautaire ne peut répondre à la demande de nombreux services. Lui ajouter des responsabilités n’améliorera pas la situation. Ce sont les gens en situation de pauvreté qui en souffriront.
Que viennent faire les sociétés privées dans la lutte contre la pauvreté? Elles sont généralement contre des mesures pouvant réduire la pauvreté telles que l’augmentation du salaire minimum, la hausse des taux de bien-être social, l’équité salariale ou même un système public de garderie. Le secteur privé désire-t-il influencer les politiques sociales? Veut-il dorer son image? Cherche-t-il à remplacer le gouvernement dans la livraison de services publics?
Une dernière question, celle de la transparence et de la responsabilité. Lorsque les services à la population sont livrés par des organismes publics et par les fonctionnaires, le public a accès aux rapports d’activités annuels, les salaires sont déclarés et les pratiques administratives et financières sont scrutées. Ce n’est pas toujours le cas quand ce sont des groupes communautaires sans but lucratif qui sont chargés d’administrer ces programmes.
La pauvreté, version 2011, propose une toute nouvelle structure, un nouveau budget et de nouveaux services. Mais dans tout cela, où se trouvent les 100 000 personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté? Il s’agit en effet de milliers de dens à bas salaire, des 40,000 enfants et adultes dépendant du bien-être social et des ainés recevant le supplément annuel garanti. Sommes-nous en présence de la pauvreté sous haute surveillance ou bien d’une utilisation de