L’heure est grave. Croix Bleue Médavie est en train d’avaler notre système de santé une bouchée à la fois. Son PDG Bernard Lord voudrait nous faire croire qu’il agit par pure altruisme, par pure générosité lorsqu’il nous propose de prendre en mains plus de services publics parce qu’il « peut faire mieux ».
Cette compagnie « à but non lucratif » nous coûte de plus en plus cher : sa facture au gouvernement est passée de 100 millions de dollars en 2016 à plus de 200 millions en 2022.
Médavie a déjà mis le grapin sur nos services ambulanciers, sur le programme extramural, sur Lien Santé NB, qui ouvre des cliniques ici et là dans la province, et voilà que Lord veut faire main basse sur Télé-soins 811 pour mieux « coordonner » les services. Or, plus sa compagnie « coordonne » nos services de santé, plus elle en prend le contrôle. Ne soyons pas dupes, Médavie n’est pas un organisme de charité et son PDG n’est pas un bénévole : ses salaires faramineux sont payés à même nos poches. Il est là pour faire de l’argent, un point c’est tout.
C’est bien connu, lorsqu’une compagnie a le monopole d’un service, elle a beau jeu pour ensuite augmenter ses frais, et surtout pour dicter au gouvernement quelle direction le service doit prendre à l’avenir. Pendant ce temps, notre système public de santé continue de s’affaiblir. L’argent que le gouvernement investit dans le secteur privé est de l’argent de moins pour le secteur public. Les compagnies offrent des conditions de travail plus alléchantes aux travailleuses et travailleurs de la santé pour les attirer dans leurs cliniques, où ces personnes n’auront jamais à travailler la nuit, jamais à faire d’heures supplémentaires à n’en plus finir, et où les patient·e·s seront beaucoup plus simples à traiter, puisqu’on ne choisit que les cas simples, laissant ainsi les cas plus complexes au secteur public.
Résultat : le système public, déjà en grande pénurie de personnel, voit de plus en plus de travailleuses et travailleurs de la santé sortir du système public pour intégrer le secteur privé. Des gens meurent dans les urgences, faute de personnel pour s’en occuper, dans un système où la qualité des soins et des services continue de se détériorer.
Comment savoir ce qui se passe vraiment avec les services gérés par Médavie? La compagnie n’a aucun compte à rendre à la population et, pour des raisons commerciales, elle refuse de divulguer toute information sur l’efficacité de sa gestion « innovante ». On peut innover pour faire du bien aux autres, mais on peut aussi innover aussi pour ses propres intérêts. Une compagnie n’est pas un organisme de charité. Ce sont ses propres intérêts qu’elle privilégie. Toujours.
Lorsque le système de santé relève du gouvernement, il est imputable à l’Assemblée législative et à la population. Lorsque le système tombe dans les mains du privé, nous perdons tout pouvoir et devenons incapables d’orienter nos soins de santé pour qu’ils répondent le mieux possible aux besoins de la population, qui en assume les coûts.
Et que ferons-nous le jour où nous nous apercevrons que nos données personnelles ont « par accident » été transférées à la compagnie d’assurance Croix Bleue (à laquelle Médavie est affiliée) pour mieux évaluer les risques associés à notre dossier médical?
La place croissante des entreprises privées dans notre système de santé n’est pas la meilleure solution à la crise que nous traversons, bien au contraire!
Bernadette Landry milite depuis des décennies contre toutes sortes d’injustices sociales. Elle est membre du Comité régional Dieppe-Moncton de l’Association francophone des aîné·e·és du Nouveau-Brunswick et de la Coalition du Nouveau-Brunswick sur la santé.