De Vancouver à Ugpi’ganjig (Eel River Bar) et Belledune, dans la baie des Chaleurs, en passant par Tokyo et Rio de Janeiro, la montée du niveau de la mer représente l’une des plus grandes menaces pour l’humanité à l’ère des changements climatiques. Pourtant, elle est très peu médiatisée et souvent mal comprise par la population.
Si le nombre de personnes menacées par la montée du niveau de la mer dépend de nombreux facteurs, tels que la hauteur de la montée des eaux, la vitesse à laquelle elle se produit et la vulnérabilité des populations côtières, une étude menée par Climate Central et Kulp & Strauss en 2019 a révélé que plus de 300 millions de personnes dans le monde vivent dans des zones côtières qui seront submergées ou régulièrement inondées d’ici 2050, et ce, même si les émissions de gaz à effet de serre sont réduites conformément aux objectifs de l’Accord de Paris sur le climat.
Plus récemment, le 15 février 2023, le secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU) lançait l’alerte contre le risque d’un exode d’ampleur « biblique » en raison de la montée du niveau de la mer. Et en début mars, c’est le service d’espionnage du Canada qui lançait la sonnette d’alarme, en avertissant que le changement climatique constitue une menace profonde et permanente pour la sécurité et la prospérité nationales, y compris la perte possible de certaines parties de la Colombie-Britannique et des Provinces atlantiques en raison de l’élévation du niveau de la mer.
Selon la Banque mondiale, plus d’un milliard d’humains pourraient être directement affectés. Et la mauvaise nouvelle présentement, c’est que cette hausse s’accélère dangereusement. Alors que l’augmentation annuelle était auparavant estimée à environ 2,8 millimètres par an, elle est aujourd’hui de plus de 4,2 millimètres.
Si les causes de cette accélération sont difficiles à expliquer avec précision, le phénomène, lui, est généralement attribué à la fonte des glaciers et des banquises de la planète ainsi qu’à l’expansion thermique de l’eau due à son réchauffement.
Justement, les océans absorbent plus de 90% de l’excès de chaleur provoqué par les gaz à effet de serre émis par l’activité humaine. Pour cette raison, en 2022, les océans de la planète ont enregistré de nouveaux records de chaleur. L’augmentation de la température moyenne de la planète est en fait tellement régulière et robuste que de nouveaux records similaires sont établis chaque année
En plus d’un réchauffement océanique significatif ayant des répercussions sur l’ensemble des écosystèmes et de la biodiversité, la montée du niveau de la mer engendre également des conséquences graves, telles qu’une érosion du littoral, l’inondation des zones humides, la contamination saline des nappes aquifères et des terres agricoles, de même qu’une perte d’habitat pour les poissons, les oiseaux et les plantes, alors que la pression écologique sur ces espèces est déjà énorme.
Le 8 mars 2023, l’observatoire européen du changement climatique confirmait que la banquise en Antarctique a atteint, en février, un record de fonte, soit l’étendue la plus faible depuis 45 ans, c’est-à-dire depuis que les données satellitaires sont enregistrées. Pour ce qui est de l’Arctique, une nouvelle étude montre qu’il s’est réchauffé près de quatre fois plus vite que le reste du monde au cours des 43 dernières années. Cela signifie que l’Arctique est en moyenne 3℃ plus chaud qu’en 1980.
Il est clair que la planète se réchauffe dangereusement, que le niveau de la mer augmente rapidement et que les conséquences de ce phénomène sont déjà très réelles. Le Nouveau-Brunswick et les Provinces atlantiques ne seront pas épargnés, au contraire.
Nous devons donc commencer à réfléchir sérieusement à des solutions qui nous permettront, dans un avenir rapproché, de nous adapter à une nouvelle réalité écologique et climatique et, bien évidemment, politique et économique, puisque la crise climatique n’engendra assurément pas que des changements aux niveaux environnementaux.
Les preuves scientifiques sont accablantes. Elles montrent une accélération alarmante de ce phénomène et mettent en évidence les conséquences dévastatrices qui en découlent.
Les appels lancés par des organisations internationales et les alertes des expert·e·s soulignent l’urgence d’agir maintenant face à cette crise dont les effets ne cessent de s’amplifier. Il est impératif que nous prenions des mesures sérieuses pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et atténuer les effets du réchauffement climatique. De plus, il est crucial de développer des stratégies d’adaptation qui permettront aux communautés côtières de faire face aux défis futurs.
La transition vers une économie plus durable et la mise en place de politiques environnementales efficaces sont essentielles pour lutter contre la dérive climatique et la montée du niveau de la mer. Cela nécessite une coopération internationale et locale accrue, des investissements massifs dans les énergies renouvelables, l’adoption de pratiques durables dans tous les secteurs d’activité humaine, l’adoption globale de régimes alimentaires à base de plantes et une sensibilisation généralisée aux enjeux liés aux changements climatiques.
Le Nouveau-Brunswick, avec ses magnifiques côtes et ses communautés côtières prospères, est particulièrement vulnérable à la montée des eaux. La perte potentielle de terres, d’infrastructures et de ressources naturelles est une réalité inquiétante qui exige des actions immédiates et soutenues.
Il est essentiel que les décideurs et décideuses politiques, les scientifiques, les communautés locales ainsi que la population dans son ensemble collaborent pour mettre en œuvre des stratégies d’adaptation et d’atténuation. Cela inclut des mesures telles que la construction de digues et de protections côtières, la promotion de pratiques de construction résilientes, la planification urbaine intelligente et la sensibilisation du public aux enjeux de la montée du niveau de la mer.
Yoan Bourgoin détient un baccalauréat en biologie de l’Université de Moncton. Militant environnemental, il participe au Sommet Action climatique de New York en 2019. Grâce à un texte sur l’environnement, il remporte un prix lors d’un concours d’écriture universitaire sur les capacités limites de la Terre. Son militantisme s’étend des changements climatiques aux droits des animaux. Il fut sélectionné parmi les 30 jeunes francophones à surveiller au Nouveau-Brunswick en 2020 par L’Acadie Nouvelle et, en 2021, parmi les 50 jeunes engagé·e·s dans le cadre du 4e Congrès international sur le conseil scientifique aux gouvernements et des 50 ans de la Francophonie, où il reçut une bourse d’excellence pour sa contribution scientifique. En 2022, il fut sélectionné pour participer au Congrès Stockholm+50 dans le cadre d’une réunion cruciale pour l’environnement et la biodiversité.