Je suis parent et les minutes comptent. Comme vous, je trouve que mon temps libre est particulièrement important. Alors, il vous paraît peut-être bizarre que j’ai pris un total de 40 heures pour fermer mes comptes Meta, comme Facebook, Messenger et WhatsApp. J’ai sûrement de meilleures choses à faire de mon temps, n’est-ce pas?
Au fait, c’est un investissement.
Il y a plusieurs années déjà que je me méfie de Facebook, plate-forme qui a plusieurs défauts. Vous en avez peut-être assez, vous aussi, des opinions exprimées dans le vide, de la désinformation, et des publicités interminables.
Le coup de grâce, pour moi, a eu lieu en janvier lorsque Meta a modifié sa politique sur les discours haineux, et qui dit :
« We do allow allegations of mental illness or abnormality when based on gender or sexual orientation, given political and religious discourse about transgenderism and homosexuality and common non-serious usage of words like ‘weird’ ».
Assez c’est assez. Meta n’a pas d’argent sans nous, les utilisateurs, puisque nous sommes le « produit ». C’est à dire que notre information personnelle possède une très grande valeur, sur laquelle repose le pouvoir de Meta en tant qu’entreprise – qu’il soit économique ou politique.
Alors, que faire ? Si vous souhaitez conserver votre réseau social il faut l’entretenir. Mais ça n’a pas besoin d’être fait sur une plate-forme comme Meta.
Si vous écrivez un seul message à l’entièreté de votre réseau (du genre « je quitte cette plate-forme », sachez que l’algorithme de Meta récompense les interactions. Donc si quelqu’un vous est cher, mais vous ne leur avez pas parlé pendant une année ou plus, iels ne verront peut-être pas votre message.
Cette personne vaut bien un message de courtoisie, le temps de lui dire comment vous rejoindre. Multipliez le temps nécessaire pour avoir cette conversation par le nombre de contacts auxquels vous souhaitez écrire, et voilà. C’est probablement des dizaines d’heures de travail.
J’énonce alors pourquoi ça vaut la peine d’investir le temps nécessaire pour quitter Meta.
D’abord c’est le fun! Nous avons tous des amis avec lesquels nous pouvons jaser allègrement, même après des années.
Ensuite c’est nostalgique, parce qu’on se rend parfois compte que plusieurs années sont passées avant de reprendre contact. Dans mon cas, c’est parce que j’ai eu un enfant ! Donc ça aide, les gens comprennent.
Ensuite, c’est émouvant. J’ai trouvé des messages qui m’ont envoyé par une grande-tante qui est maintenant décédée. Si vous êtes dans la trentaine comme moi, les chances sont raisonnablement bonnes que vous ayez un historique Messenger semblable.
Bien sûr, c’est satisfaisant de reprendre le pouvoir sur nos circonstances. On a parfois l’impression, en politique, que nous sommes petits et relativement impuissants. Mais je pense avoir convaincu plusieurs personnes de quitter ou de réduire leur utilisation des produits Meta. Des conversations qui n’auraient pas eu lieu si j’étais simplement partie.
Mais surtout, je me suis rendue compte de la vraie valeur de la communication. En renouant avec des ami.es je suis parfois sortie luncher pour jaser de divers sujets en profondeur. Pourquoi pas ! C’est tellement plus facile, et plaisant, de parler des grands sujets en personne, ou même des petits sujets qui seraient autrement ignorés en mode « scrolling ».
La vie de tous les jours est intéressante, oui, mais elle est aussi répétitive. Quand on se donne la peine de créer un événement, que ce soit une rencontre en personne ou un appel, ça fait du bien parce que ça casse la routine. En plus, on n’a pas le choix que de mettre de l’ordre dans nos idées, donc nos interactions sont enrichies parce qu’elles sont réfléchies.
En distribuant quarante heures d’effort sur trois mois, j’ai travaillé assidûment, mais je ne me suis pas tuée à la tâche non plus. J’ai créé de nouveaux projets, appris de nouvelles choses et trouvé de nouvelles opportunités.
On ne demande pas mieux dans notre vie d’adulte, non?
Caterina Corazza travaille comme recherchiste à Moncton et profite habituellement de son temps libre en famille, ou en pratiquant le roller derby.